9 mai 2012
La tauromachie est sans cesse confrontée à son histoire, soit pour glorifier le présent (« on torée de mieux en mieux, la mansedumbre recule… »), soit, plus souvent, pour exalterle passé (« la caste dégénère, le toreo s’édulcore, on oublie les vraies valeurs… »).
Cet appel à l’histoire nous aide à juger notre époque ; mais ce qu’on invoque, c’est, le plus souvent, un passé déformé par nos croyances, par les mythes ou les souvenirs embellis de la jeunesse.
Qu’en disent donc les historiens ?
Le Club taurin de Paris a la chance de disposer dans ses rangs de solides arguments en la matière : François Zumbiehl vient de publier Une brèv ehistoire de la corrida (éd. J-C Béhar), qui revisite en une « vue cavalière » les trois derniers
siècles du toreo et de l’élevage de bravos tout en glissant ici ou là, dans les interstices dutableau, ses propres émotions. Il sera confronté à Araceli Guillaume-Alonso, hispaniste et historienne, qui a jadis remis les pendules à l’heure sur les siècles plus obscurs de latauromachie et montré la diversité des pratiques taurines ancestrales.
Nous sommes donc fiers de vous convier à un
mano a mano
François Zumbiehl & Araceli Guillaume-Alonso sur
« Écrire l’histoire de la corrida aujourd’hui »
Le compte-rendu de Philippe Paschel
LA CORRIDA DE A à Z
A l’occasion de la sortie du livre de François Zumbiehl, “Une brève histoire de la corrida” (Ed. Jean-Claude Béhar, 2012), l’auteur et Araceli Guillaume-Alonso, notre spécialiste de l’histoire taurine, firent un mano a mano autour du sujet plus vaste de l’écriture l’histoire de la tauromachie.
François Zumbiehl a écrit une histoire de la corrida, pas de la tauromachie, avec une vue cavalière, c’est-à-dire une synthèse avec une certaine désinvolture, mais en suivant toujours un fil chronologique. Il a été particulièrement intéressé par sa nature, rituel de mort et acte de création artistique, se posant la question de savoir pourquoi la mort fait partie du spectacle.
Araceli Guillaume-Alonso a rappelé plusieurs points d’histoire : lien avec les abattoirs de Séville, rapports complexes et contradictoires avec les Lumières: d’un côté l’opposition d’intellectuels comme Jovellanos, de l’autre l’affirmation de soi des toreros, un non-noble qui porte l’épée, et publie un traité de toreo (Pepe Hillo).
Pour François Zumbiehl un des points essentiels a été l’étude de la “forge” du taureau : son élevage, véritable création, qui à partir de la sauvagerie a obtenu la bravoure.
Au bout du compte, pour lui, la corrida est un art bouleversant d’un extrême raffinement. Mais il y a des nuages d’inquiétude, extérieures avec le développement d’une mentalité contraire aux valeurs de la tauromachie et intérieures, par un excès de normes et de prévisibilité -une sélection du taureau toujours plus précise-, d’où peut naître l’ennui.
Philippe Paschel